Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Diario (chiquito) de Bolivia
Journal bolivien subjectif et aléatoire
Suivez le FIL : en alternance , une Figure, une Idée, un Lieu en quasi-direct de l'état plurinational
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
14 avril 2019

Le Jurassic park quechua

toro-toro-umajalanta-67Toro toro ! Lectrices et lecteurs révulsés par la « barbarie » de la corrida, ne désertez pas d’emblée cette chronique. On n’évoquera pas ici les vociférations de quelque aficionado bègue pendant ce spectacle controversé et d’ailleurs inexistant en Bolivie. Toro toro (Thuru thuru en quechua : la boue) désigne à la fois une charmante localité de 3500 âmes située dans une vallée andine en plein cœur de la Bolivie et un parc national créé en 1989 pour protéger le paraba frente roja (ara au front rouge), une espèce de perroquet en voie d’extinction. Difficile de savoir où en sont aujourd’hui les populations menacées de ce psittacidé multicolore que le bloggeur n’a pu apercevoir lors de ses pérégrinations. On doute que le volatile apprécie beaucoup la popularité croissante du parc de Toro toro qui attire aujourd’hui de nombreux visiteurs séduits par le climat d’éternel printemps de cette vallée paradisiaque mais aussi par un produit d’appel d’une attractivité incomparable exploitée en son temps  par Steven Spielberg : le dinosaure.

Pattes de poulets

IMG-20190414-WA0005

Cette région du Nord de la province de Potosi a en effet les allures d’un musée de géologie, de paléontologie et d’archéologie à ciel ouvert. En découvrant la vallée, on est frappé par les gigantesques plis synclinaux qui surplombent le village, témoins des bouleversements de la croûte terrestre qui ont modelé le paysage actuel et, ironie de l’histoire, des temps crétacés ou la Bolivie était baignée par l’océan. C’est à cette époque que pullulaient au bord des plages des dinosaures de toutes sortes, pacifiques herbivores comme les apatosaures et sauropodes ou redoutables prédateurs tels le velociraptor et le tyrannosaure. Ces géants laissèrent quantité de traces dans le sol boueux, bientôt solidifiées sous forme d’argile séchée puis protégées par des couches sédimentaires apportées par la mer et revenues à la surface des années plus tard à la faveur de mouvements tectoniques. Quelques 2500 empreintes à ce jour, que les habitants du coin prenaient pour des traces de poulets géants, ont été officiellement identifiées en 1968, donnant le top départ à un tourisme paléontologique qui depuis cette époque ne fait que croître et embellir.

Plein les yeux, plein la tête

Les dinos ne sont pas le seul atout dans la manche de ce coin perdu de Bolivie. A moins de deux heures du village, un 4x4 vous conduit à travers la montagne jusqu’à la Ciudad de la Ita, magnifique site naturel à 4000 mètres d’altitude célèbre pour ses rochers gigantesques en forme d’animaux, sculptés dans la pierre par l’érosion. Le visiteur épargné par la claustrophobie peut aussi se risquer, aux côtés d’un guide sympathique mais peu regardant sur la sécurité,  dans la Caverna de Umajalanta de laquelle il essaiera se sortir sans dommage malgré les boyaux étroits à franchir, la roche glissante, les descentes de corde et les concrétions aussi splendides que menaçantes pour le crâne et le dos. Pour varier les plaisirs, il pourra aussi longer les crêtes du magnifique canyon de Vergel de plus de 300 mètres de profondeur et y descendre pour se rafraîchir sous les cascades qui alimentent la rivière qui s’est frayé un passage dans la roche calcaire (voir l’album Toro toro !).

P1050822 (2)

Paradis pas perdu pour longtemps

Mais le véritable attrait de l’escapade à Toro toro est ailleurs. Dans l’atmosphère tranquille de la rue principale du village à la tombée de la nuit avec ses paysans en costume traditionnel qui viennent manger un morceau ou taper la discussion en quechua. DansIMG-20190414-WA0034 le charme des habitations en adobe dans lesquelles vivent en autarcie presque complète des familles indigènes autour de leurs cochons, leurs poules, leurs moutons, leurs champs de maïs et de céréales et leur potager. Dans la compétence et l’amabilité des guides locaux, regroupés dans une maison des guides où tous les employés sont issus du terroir, fiers et heureux de faire découvrir leur coin de paradis. Un paradis pour l’instant préservé par une ouverture au tourisme mesurée et contrôlée par les habitants des 70 communautés de la région. Les quelques six heures de mauvais chemin nécessaires pour accéder à Toro toro depuis Cochabamba, la ville la plus proche, sont aussi sans doute dissuasives.

Pourtant le progrès est en marche. D’ici 2020, grâce aux bénéfices engrangés et … à Evo, c’est une route asphaltée qui serpentera dans les magnifiques paysages andins qui séparent Cochabamba du village. Angelika, la charmante tenancière du Toro toro Hostal économisera du temps et de l’énergie dans son voyage hebdomadaire de douze heures en trufi pour ravitailler son établissement. Pour le Jurassic Park quechua, il s’agira alors de ne pas se transformer en Disneyland.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité