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Diario (chiquito) de Bolivia
Journal bolivien subjectif et aléatoire
Suivez le FIL : en alternance , une Figure, une Idée, un Lieu en quasi-direct de l'état plurinational
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20 mai 2019

Le SUS* s'est trompé ?

 DSC_1001« Mieux vaut être riche et bien portant que pauvre et malade » : le dicton du café du commerce prend une résonnance toute particulière en Bolivie. L’état plurinational ne consacre qu’un peu plus de 6 % d’un PIB déjà très bas aux dépenses de santé, soit deux fois moins que la France et trois fois moins que les Etats-Unis. Résultat : une espérance de vie très faible (69/74) et une mortalité infantile importante (3,5% avant 5 ans). Mais le plus choquant pour un pays qui s’affiche socialiste réside dans les profondes inégalités qui frappent les Boliviens en la matière. Quatre personnes sur dix ne disposent d’aucune couverture santé. Le système de  Caisse nationale de santé créé en 1956 et qui oblige les entreprises à cotiser à une caisse professionnelle d’assurance santé ne concerne que les salariés de l’économie formelle et laisse de côté la moitié de la population. Evo, qui s’est attaqué avec un certain succès à la réduction de la pauvreté, a clairement failli dans ce domaine. En 2013, une première loi visant à créer une couverture pour les plus démunis a échoué, en attribuant la compétence à des régions souvent réfractaires à y consacrer une part de leur budget. Malgré les splendides cliniques privées (voir ci-dessous) et les praticiens formés à l’étranger qui y officient, les Boliviens les moins favorisés continuent donc à perdre leurs enfants pour de banales infections, à vendre leur maison pour soigner un cancer ou à mourir d’un infarctus faute d’un service d’urgence susceptible d’intervenir rapidement.

Sus à la maladie

Elections présidentielles obligent diront les plus perfides, Evo s’est décidé l’an dernier à agir pour tenter d’estomper ce qui reste une tâche noire sur son bilan social avec la création du SUS (Servicio único de salud). Ce service unique de santé dans lequel le  gouvernement a  investi 200 millions de dollars se propose de fournir une assurance santé à toutes les personnes qui en sont démunies et leur permettre d’accéder ainsi gratuitement aux services dispensés par l’hôpital de proximité. Après dDSC_0997eux mois d’inscription pour les ayants droit, le SUS est censé être opérationnel depuis le 1er mars dans les régions qui l’ont adopté. En cette période électorale, les boucliers se lèvent de toute part chez les opposants. La frange libérale, à l’image des Républicains pourfendant l’Obama Care, crie au gaspillage des deniers publics en direction d’assistés, de feignants et de simulateurs qui ne veulent pas travailler. Pour le gouvernement régional de Santa Cruz qui a créé sa propre assurance santé, c’est une double peine avec l’argent de l’impôt consacré à un système moins performant que le sien. Les professionnels et les connaisseurs du système de santé avancent des arguments qui semblent plus fondés. Comment accueillir de nouveaux patients alors que les hôpitaux publics sont déjà saturés, dotés d’un matériel et d’un personnel insuffisants ? Selon l’OMS,  23 médecins ou infirmiers pour 10 000 habitants permettent de couvrir les besoins essentiels de santé. En Bolivie, ce chiffre tourne autour de 5 pour 10 000 sans tenir compte des médecins qui se consacrent dans le privé à un nombre restreint de patients fortunés. La première réforme indispensable serait donc de créer les  structures de soin et les postes de personnels de santé nécessaires.

Des patients qui patientent

Le bloggeur, qui fait partie des heureux privilégiés couverts par une assurance santé souscrite par son employeur, mesure à son niveau l’étendue des lacunes du système. Une matinée d’attente pour rencontrer un médecin pour une simple visite médicale, deux heures pour une analyse d’urine et une de plus pour un prélèvement sanguin qui s’effectue évidemment dans un autre endroit avec une queue supplémentaire d’une heure pour obtenir les résultats. Et quand on tombe vraiment malade ?  Se lever vers quatre heures pour solliciter le rendez-vous avec une chance de l’obtenir dans la journée, revenir vers 18 heures si on a de la chance pour le diagnostic et l’arrêt de travail éventuel. Pour un spécialiste ? Compter trois heures d’attente malgré le rendez-vous qu’on peut prendre cette fois sur l’application de son smartphone (on n’arrête pas le progrès !).

La patience est une qualité indispensable en Bolivie. Les 5 millions de Boliviens qui n’ont pas accès à une santé publique gratuite et qui placent leur espoir dans le SUS en auront sans doute bien besoin.

 *service unique de santé

 

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