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Diario (chiquito) de Bolivia
Journal bolivien subjectif et aléatoire
Suivez le FIL : en alternance , une Figure, une Idée, un Lieu en quasi-direct de l'état plurinational
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8 avril 2019

Bolivia by bus

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La Bolivie n’a pas attendu les préconisations de Jacques Attali ni la fameuse loi Macron sur les bus pour faire de ce moyen de transport un recours quasi incontournable dans le pays. Si l’avion offre une rapidité et un confort incomparables pour qui n’est pas trop soucieux de son bilan carbone, avec des aéroports dans toutes les villes boliviennes, son tarif reste dissuasif pour l’immense majorité de la population. Quant au train, développé dès le XIXème Siècle pour quelques liaisons-clé comme La Paz-Villazón (Argentine) ou Santa Cruz-Corumba (Brésil), son réseau devenu privé est depuis resté en rade, voire abandonné pour le transport de voyageurs. En cause sans doute le relief particulier d’un pays à demi-envahi par l'imposante Cordillère des Andes qui multiplie les contraintes techniques et structurelles et condamne les convois à évoluer à une vitesse nettement inférieure à celle d’un cheval au galop.

Voyager couché

Va donc pour l’autobus, dénommé ici "flota". Pour le trouver, on se mettra en quête d'un de ces terminaux routiers dont se sont dotés la plupart des cités boliviennes. Dans les grandes villes comme la Paz ou Santa Cruz, le terminal de bus a des allures de ruche populaire et a56414059_411715069621573_145427923355041792_nnimée. On peut y boire, manger, faire ses courses, se reposer et bien sûr s’adresser à l’un des nombreux guichets qui se tirent la bourre pour attirer dans leurs filets l’aspirant voyageur. Les bus boliviens, pour un prix très modique (50 bolivianos, à peine 8 euros par exemple pour faire les 400 kilomètres qui séparent Cochabamba de Santa Cruz) offrent un standing à faire rêver l’usager français du Ouibus. Trois sièges seulement dans la largeur, dotés d’appuie-tête et de repose-pied, inclinables dans la version "semi-cama", transformables en véritables couchettes pour la version "cama" ou "leito", selon le vocable venu du Brésil d’où est originaire ce concept de véhicule tout confort. Ajoutons à ce tableau avantageux, l’équipement vidéo et parfois wi-fi pour certains modèles ainsi qu’une vision panoramique sur la route et le paysage rendue possible par le positionnement des passagers à l’étage au-dessus du chauffeur.

Le sale air de la peur

"Que demande le peuple ?" pense déjà in petto le lecteur franchouillard prêt à embarquer et que nous inviterons néanmoins auparavant à parcourir cette chronique jusqu’à son terme. Qu’il prenne en compte en premier lieu l’état du réseau routier bolivien : peu de routes en asphalte, saturées de poids lourds chargés jusqu’à la gueule, de véhicules divers parfois en piteux état et de motocyclettes zigzagantes. Quand les routes font défaut, elles font place à des pistes tantôt caillouteuses, tantôt boueuses, parsemées de nids de poules (d’autruches ?) dans lesquelles vous n’engageriez pas votre Clio ! Route ou piste, la problématique est la même sur la 56910145_358408978103934_8810062119870398464_nplupart des trajets. Il faut à un moment donné, franchir des cols culminant à 4000 mètres, s’enfiler des chemins andins tracés à la lisière de précipices vertigineux, klaxonner à tour de bras à chaque virage sans aucune visibilité, franchir à gué des rivières de montagne au-dessus desquelles on n’a pas jugé utile de prévoir un pont. Face à cette adversité, le chauffeur de bus bolivien reste impavide, aidé en cela par la boule de coca qu’il mastique durant tout le trajet et les ritournelles de musique andine dont il inonde le véhicule quand il ne diffuse pas une vidéo de karaté à fond les ballons à usage du voyageur qui venait de réussir à s’endormir malgré la peur. Lorsqu’on le voit sortir de sa cabine de conduite verrouillée, c’est pour proposer un arrêt devant une gargotte qui permet enfin de détendre ses sphincters en même temps que se restaurer à peu de frais. Ou alors, armé d’un tournevis ou d’une clé à molette, c’est qu’il doit résoudre lui-même (et souvent avec succès) un problème technique sur un véhicule pas toujours très jeune et soumis à rude épreuve.

S'en remettre au Bon Dieu plutôt qu'à Evo ?

Les miracles constituant rarement une règle, les statistiques de la sécurité routière bolivienne sont mauvaises. 130 morts dans les seuls accidents de bus en 2016, année "record", 83 en 2017, 73 en 2018 pour 274 accidents. Avec déjà 42 décès, l’année 2019 ne semble pas s’engager sous de très bons auspices. Que faire ? S’en remettre à quelques amulettes achetées au marché des sorcières de La Paz ? Chuchoter discrètement deux Ave et trois Pater en esquissant un signe de croix avant chaque voyage comme la plupart des chauffeurs ? Choisir de voyager dans les "trufis", petits transports collectifs qui assurent la plupart des destinations dès que leurs sièges sont complets ?

Le gouvernement bolivien est engagé dans un vaste programme d’amélioration et de création de routes, forcément très lent au vu de l’étendue de la tâche. Contraint de réagir après les quelques accidents spectaculaires de ce début d’année, il a parlé de contrôles renforcés sur les véhicules et leurs chauffeurs, de développement de radars pour contrôler la vitesse. Mais les puissants syndicats du transport public ne l’entendent pas forcément de cette oreille…

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