Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Diario (chiquito) de Bolivia
Journal bolivien subjectif et aléatoire
Suivez le FIL : en alternance , une Figure, une Idée, un Lieu en quasi-direct de l'état plurinational
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
1 mars 2020

Traces de Sucre

P1060314 (3)Si comme le dit la citation, l’histoire est utile, non pour y lire le passé, mais pour y prédire l’avenir, on conseillera aux Boliviens, au moment de choisir leur nouveau président, de se replonger dans les faits et gestes du premier d’entre eux, le maréchal Antonio José de Sucre, nommé à la magistrature suprême lors de la libération du Pérou du joug espagnol en 1825, à la naissance de la République bolivienne. À ce stade de la chronique, le lecteur perspicace aura, à juste raison, fait le lien entre le patronyme du héros national et la ville bolivienne du même nom, lui qui pensait jusqu’ici que la capitale administrative de la Bolivie (voir l’album Sucre la blanche) avait été baptisée ainsi à cause des champs de canne à sucre avoisinants.

Aux âmes bien nées…

Né au Venezuela, le 3 février 1795, d’une famille noble à l’ascendance européenne, Antonio ne tarde pas à se mettre dans les pas du cheval de son militaire de père en même temps qu’il prend fait et cause pour le combat indépendantiste face aux royalistes eP1040058spagnols. Dès l'âge de 15 ans, il intègre les premières factions opposées à la couronne et devient lieutenant en 1812. Contraint à l’exil à Trinidad, il revient à la charge en 1813 pour participer à la guerre de libération du Venezuela et y gagne ses galons de colonel. Sa précocité, son sens de l’organisation, son génie militaire ainsi que la clarté de son projet politique attirent l’attention de Simon Bolivar, dont il devient rapidement un soutien indéfectible en adhérant à son grand projet de création d’une fédération d’Amérique du Sud sur le modèle des États-Unis. Il participe avec lui à la libération du Venezuela, à la création de la grande Colombie regroupant le même Venezuela et la Colombie. Nommé par Bolivar à la tête de son armée de libération, il gagne la bataille de Pichincha en 1822, décisive pour affranchir l’Equateur de la couronne espagnole. La route est dégagée pour s’attaquer au dernier bastion espagnol, le Pérou, affaibli, divisé qui laisse rapidement le champ libre aux troupes indépendantistes après les combats historiques de Junin et d’ Ayacucho en 1824. Sucre aux côtés de Bolivar y démontre une nouvelle fois sa science de la guerre et sa loyauté. Ainsi quand les populations de l’ancien Alto-Peru (l’actuelle Bolivie) acclament le Libertador et revendiquent la création d’une République, c’est le nom de Bolivar qui est proposé pour la baptiser et celui du Maréchal Sucre pour devenir son Président à vie. Car Antonio de Sucre ne se contente pas d’être un excellent stratège militaire, c’est aussi un politique avisé, honnête et droit, soucieux de respecter les minorités et les droits de l’homme. C’est lui qui donne à la Bolivie sa première constitution politique en 1826 et qui organise les institutions de l’État en adoptant comme système administratif le modèle français des départements.

Triste fin

Deux ans plus tard, Sucre choisit de quitter son poste pour tenter de sauver Bolivar et son projet de grande Colombie qui commence à vaciller sous les coups de boutoirs des intérêts disparates des notables régionaux. Au Venezuela et au Pérou notamment les chefs de guerre, anciens compagnons de lutte,  lâchent progressivement el Libertador pour s’adjuger leur part de gâteau.  Menacé de toutes parts, Bolivar s’autoproclame dictateur pour disposer des pleins pouvoirs mais doit démissionner en mai 1830 terrassé par une grave maladie. Sucre, qu’il considère comme son fils spirituel, prend alors le relais et se fait élire président de Colombie. En juin 1830. victime d’une embuscade à San Juan de Pasto dans les Andes colombiennes, Antonio meurt assassiné à 35 ans, précédant de peu son mentor qui périra en décembre de la même année, isolé et désespéré par son échec. On le sait, les histoires de révolution, comme d’autres, finissent mal en général.  Celle-ci, épique, sanglante, utopique et passionnée mérite pourtant qu’on s’y attarde comme vient de le faire Netflix dans une série plutôt réussie de soixante épisodes d’une heure ! Révolution d'aristocrates certes, souvent incapables d'administrer les territoires arrachés à la royauté au bénéfice des peuples "libérés", peu soucieux du destin des indigènes ou du sort des esclaves venus d'Afrique, mais révolution portée aussi par des idées généreuses, par l'héroisme et le don de soi...

De quoi considérer d’un autre œil les multiples statues équestres du bel Antonio, toutes rouflaquettes dehors, qui ornent les places des grandes villes Boliviennes (ci-dessus à Tarija).

De quoi peut-être aussi donner aux candidates et candidats des prochaines présidentielles boliviennes un peu de souffle et d’ambition pour leur pays et leur continent …

4595c04c5a1f2c08bdccfbcde1a95332

Publicité
Publicité
Commentaires
E
Merci de ce commentaire élogieux qui me touche de la part d'une lectrice fidèle !
Répondre
N
Très intéressant et documenté..Il semble que le blogger mette les bouchées doubles depuis cette rentrée scolaire bolivienne (un baroud d'honneur ?) Dommage, on aime améliorer ses connaissances sur ces pays si séduisants et si lointains...
Répondre
Publicité